Lavomatic love affair

Ça faisait maintenant quelques mois que je croisais ponctuellement Jean et sa pépée, une immense allemande au teint falot, du genre plutôt effacée. Les tourtereaux, deux beaux spécimens de bobos tout droit sortis d’une pub The Kooples, faisaient le pied de grue devant le Wash’n Dry jouxtant le troquet où j’allais prendre mon p’tit crème habituel, attendant clope au bec la fin du cycle de leur machine. Avec Jean, du sourire en coin échangé on était passé au brin de causette régulier pour, au fil des nombreux papotages, finir par bien sympathiser.
Mais ce jour-là, je trouve Kathrin en tête-à-tête avec sa Vogue Bleue Superslims.
- Ton mec s’est fait porter pâle ?
- Jean en aime une autre.
Ah, la rigueur germanique. Pas un mot d’trop. Je propose du coup à la grande gigue brune de m’accompagner au café plutôt que de patienter seule. Surprise sans paraître gênée, elle accepte d’un « ja » apathique.
Devant sa bière, Kathrin retrouve des couleurs et, loin de mes clichés à deux sous, je découvre une tornade teutonne, pleine d’esprit, de gouaille et d’entrain.
Plusieurs pintes plus tard, sortis du bar, je l’accompagne reprendre son linge à la laverie libre-service. Panière sous le bras, sans doute grisée par ses trois mousses, elle m’invite à monter chez elle.
On s’attrape la bouche dans le hall et c’est fute aux mollets qu’on passe la porte du studio.
Notre épique partie de cul achevée, le silence retombe dans la pièce.
- …Pour Jean, comment t’as su ?
- Quoi donc ?
- Et bah qu’il en aimait une autre.
- Ah…Nan mais ce que je voulais dire, c’est qu’il aime une autre Kathrin. Celle qu’il veut voir.
- Et si tu m’parlais d’la vraie Kathrin ?
- Je viens juste de te la montrer. Bon…J’ai plus qu’à retourner là-bas, laver ces foutus draps.
La semaine suivante, sur le chemin du bistrot je retombe sur le tandem trendy.
- Hey, hey ! En mode no smoking aujourd’hui ?
- Yep ! Le premier jour du reste de nos vies ! Enfin notre vie ! On a décidé d’arrêter et on est super motivé ! Pas vrai chérie ? » s’exclame Jean tout en retroussant sa manche de t-shirt pour exhiber son Nicopatch.
- Ja ! » réplique Kat’, d’un ton jovial surjoué.
Derrière la vitre du Wash’n Dry, leur machine tourne à plein régime.