La surprise du chef

Pareil à un gamin dans les rayons d’un Toys’R‘Us, j’hésite depuis bientôt une heure, planté devant ma vitrine pixélisée. Mon choix se porte finalement sur une superbe poupée de l’est : Slava. Ses sublimes seins en poire et son regard de femelle lynx de Sibérie ont fini de me décider. La putain made in Poutineland précise dans son annonce que « si n’elle n’est pas donnée c’est parce qu’elle se donne à fond ».
Un appel et une douche plus tard, je décolle de l’appart pour aller retrouver ma ruskov à poitrine Comice dans sa chambre à baiser, située côté porte de Pantin. Le quartier fait pas trop rêver, ce qui donne du charme à cette passe : une perle de nacre veloutée nichée au cœur d’une huître rance.
Excité comme un gosse, à la sortie du périph je songe à tirer du liquide. Je m’enfonce dans l’avenue Jaurès et roule au pas, en quête d’un D.A.B. L’artère est quasiment déserte, faut dire qu’il est bientôt minuit et que l’endroit n’incite pas vraiment à la promenade digestive.
Je commence à m’impatienter quand ca y est, j’en vois un: planté près d’un kebab aux néons déglingués et encore allumés, il est là, fente offerte. Je stoppe ma brèle et sors ma carte. À peine le code composé, je sens un doigt sur mon épaule.
- Chef, tu m’prêtes dix sacs ? J’ai faim.
Sans même me retourner et tandis que les billets sortent, je marmonne un « j’ai pas ».
- Bien sûr que t’as, j’suis affamé mais pas aveugle.
Le doigt du type glisse vers mon cou, il se fait plus tranchant, plus froid ; son couteau sur ma carotide, je prends les billets, les lui tends.
- J’ai pas l’appoint…
- Et moi j’rends pas la monnaie, chef.
Il range sa lame et mes biftons, puis d’un pas tranquille part se commander un kébab.
Fumasse mais pas découragé, j’insère de nouveau ma CB et recompose mes numéros. L’écran tactile m’assomme en m’annonçant un montant autorisé dépassé quand mon tire-laine, repassant derrière moi bouche pleine, m’achève :
- Bonne nuit chef !