Macadam mirage

L’été, fournaise de fin d’après midi ; je file tout droit vers un rencard. 
Le soleil cogne sur mon casque alors que je freine au feu rouge dans la rue principale d’un bled aux volets déjà clos. Effet de flou sur l’horizon bitumé ; un peu plus loin sur ma droite, une enseigne de bar s’allume. Avec son palmier vert fluo orné d’un soleil jaune pétard, le Coconut Café a tout du mirage de désert.
La porte s’ouvre, une serveuse surgit, clope au bec : cambrure de pin-up, gambettes sans fin, bouche de putain.
Le feu passe au vert, l’empaffé derrière moi klaxonne et la bombe m’adresse un sourire tout en écrasant son mégot ; langue sèche et corps en nage, j’opte pour aller boire une mousse histoire d’un peu me refroidir.
Tandis qu’elle décapsule ma bière comme elle décalotterait mon gland, je me décide à poireauter jusqu’à la fin de son service et, d’un pauvre texto, plante mon plan A.
Les chopes défilent, les heures aussi. Dehors les degrés ont diminué, dans mon sang le mercure bouillonne ; je m’affale sur la table et sombre.
Réveillé par une paume calleuse qui me tapote mollement la joue, j’émerge avec une bonne nausée et un filet de bave aux lèvres. Le patron marmonne dans sa barbe et s’en va retourner les chaises.
Sur le trottoir l’instant d’après, c’est larfeuille vide et valseuses pleines que je regarde s’éteindre le soleil de néon du Coconut Café.